Émission à l'antenne
L'ÉCO QUESTION

Médecine et transition de genre

Introduction

Vous voilà maintenant dans le deuxième chapitre de C’est pas mon genre ! Ici, vous allez lire et écouter des témoignages de personnes du corps médical. D’ailleurs, trouver des professionnels de santé trans-friendly relève parfois du défi. Les personnes transgenres ont besoin de se sentir comprises, épaulées et aidées. Nous avons pu rencontrer des médecins, psychologues, orthophonistes, endocrinologues de la région.


Transidentité et médecine générale

Chaque parcours de transition est différent, comme nous l’avons déjà précisé, il n’y a pas de chemin prédéfini. Toute personne transgenre fait ses propres choix. Toutefois, si elle décide de se renseigner sur les possibles transitions médicales, le médecin généraliste peut être une première porte d’entrée. 

Nous avons rencontré une médecin bisontine pour ce webdocumentaire et elle conseille aux personnes transgenres de se rapprocher de leur médecin de famille afin que ce dernier les oriente au mieux. Si un patient se pose des questions sur les traitements hormonaux par exemple, la professionnelle de santé va le rediriger vers un endocrinologue. Le médecin “connaît son patient et son environnement, il pratique tous les domaines de la médecine, et adapte ses soins à son patient”.

La docteure a néanmoins précisé : d’un point de vue général, les patients transgenres que je vois sont déjà suivis. Les rares fois où j ai été la première à les voir, ils sont venus pour un autre motif de consultation comme des soucis de sommeil, des douleurs au ventre et c’est souvent en fin de consultation au moment de partir qu’ils me disent être transgenre et ne pas savoir comment aborder le sujet.” Dans tous les cas, les patients recherchent “une écoute et une compétence médicale”, qu’ils aient commencé ou non leur transition. 

Au cours de nos échanges avec les professionnels de santé, nous nous sommes rendu compte que la transidentité était peu voire pas du tout abordée dans les études de santé. C’est justement ce que nous a expliqué cette médecin généraliste : la question de la transidentité n’était pas abordée lors de mon cursus médical, j’ai appris avec mes patients, j’apprends énormément auprès d’eux. D’ailleurs, chaque patient est un cas unique, qu’il soit transgenre ou non.” 


Transidentité et psychologie

Bénédicte Lucas, psychiatre à Besançon est aussi formée en sexologie et dans l'accompagnement des personnes transgenres. Elle a notamment travaillé dans un service à Genève qui accompagne des personnes trans ou des personnes ayant des troubles sexuels. Les psychiatres et psychologues font en effet partie des rendez-vous médicaux des personnes transgenres. Mais d’ailleurs, comment cela se passe ?

À chacun sa transition

Au cours de son processus de transition le patient peut faire une demande pour obtenir l'ALD, Affection Longue Durée.

L'Affection Longue Durée

Dans son cabinet, elle reçoit des personnes transgenres mais aussi parfois leurs parents. Les réactions peuvent être différentes d’une personne à l’autre.

Les réactions des autres

Transidentité et endocrinologie

Si vous vous y rendez, la plupart des endocrinologues vous demanderont une attestation de votre psychiatre avant de mettre un traitement hormonal en place. Cette lettre “certifie que votre psy ne voit pas de contre-indication à ce que vous commenciez un traitement hormonal.” (Wikitrans). Elle n’est pas obligatoire, mais comme nous venons de vous le dire, elle est souvent demandée.

Dans la cadre d’un traitement masculinisant (FTM), les personnes transgenres vont se tourner vers la testostérone et toutes ses formes, les effets attendus peuvent être le développement de la pilosité (sur le corps et le visage) ou encore la mue de la voix. Cette transition entraîne d’autres changements : la testostérone augmente la libido, la musculature se développe, la peau peut devenir grasse et à tendance acnéique, les règles s’arrêtent, etc.

Nous ne vous présenterons pas tous les traitements de manière détaillée, mais sachez qu’ils peuvent être administrés de plusieurs façons. Nous avons les injections, le gel, les patchs, les implants, les comprimés. Aussi, il y a les traitements non hormonaux comme l’huile de ricin. Il existe des alternatives à la testostérone et certaines sont naturelles.

Pour un traitement féminisant (MTF), les personnes transgenres ont recours aux oestrogènes. Dans ce cas-ci, les effets peuvent être les suivants : la peau est plus fine et moins grasse, la poitrine grossit, les cheveux poussent plus vite, on observe une diminution de la masse musculaire, réduction de la pilosité, etc. A savoir que la prise d’hormones féminisantes a aussi un effet sur les éjaculations et érections. 

A noter, que les personnes MTF peuvent aussi se tourner vers les traitements à base d’anti-androgènes et progestatifs.

Encore une fois, les exemples cités ici varient d’une personne à une autre. On ne sait jamais à l’avance quels vont être les résultats.

Nous tenions cependant à préciser quels effets étaient réversibles ou non. Ces informations ont été tirées de la plaquette Hormones et Parcours Trans de OUTrans qui peut vous servir de source si vous vous posez des questions :

À partir du moment où les effets se sont mis en place, les effets suivants sont définitifs :Au contraire, les effets suivants sont réversibles :
modification de l’aspect externe du sexe (Ft*)répartition des graisses (Ft*/Mt*)
pilosité (Ft*)volume musculaire (Ft*/Mt*) 
implantation des cheveux (Ft*)sensibilité à la chaleur (Ft*/Mt*)
ossature (Ft*)arrêt des règles (Ft*)
voix (Ft*) modification de la libido (Ft*/Mt*)
poitrine (Mt*) aspect de la peau (Ft*/Mt*)
modification des odeurs corporelles (Ft*)

Transidentité et gynécologie 

Parmi les premiers professionnels de santé qu’il est possible de rencontrer, il y a les gynécologues. De manière générale, une femme, dès ses premiers rapports sexuels rencontre un médecin gynécologue, et ce tout au long de sa vie. Que ce soit pour des consultations de préventions (Ex. cancer du col de l’utérus, cancer du sein), pour des suivis de grossesses, ou encore pour des suivis de traitements spéciaux (Ex. pilules contraceptives). Mais dans le cas d’une transition de genre, un gynécologue peut aussi bien suivre une femme, qu’un homme. C’est, par exemple, le cas d’Anne Sophie Koenig, gynécologue libérale à Montbéliard et chargée du département IVG de l’hôpital. 

“Il y a une dizaine d’années, alors que cela faisait une semaine que je venais de m’installer dans mon cabinet libéral, un jeune homme est venu à ma rencontre pour une consultation. Il m’a expliqué être une femme. Sur le coup, je n’ai pas su comment lui répondre, je ne savais pas comment lui apporter mon aide, ni vers qui l’adresser. Je me suis renseigné et lui ai proposé de s’orienter vers un psychologue, qui lui, a su l’aider. Pour moi, cette rencontre a été un déclic.”

Anne-Sophie Koenig
Quand se tourner vers un gynécologue ?

Une personne née homme, qui devient femme, doit-elle consulter un gynécologue ?

Que se passe-t-il pendant les rendez-vous ?

Pour une personne née femme, qui prend tous les jours la pilule contraceptive ou un traitement particulier avec des hormones, comment se passe la transition ? 

Compatibilité des traitements

Transidentité et voix

Sylvie Brignone est orthophoniste et cognitivo-comportementaliste. Chaque jour, elle reçoit ses patients dans son cabinet situé à Saint-Amour. Parmi eux, des personnes en transition de genre qui souhaitent changer leur voix, leurs intonations, mais aussi leur gestuelle, dans le but de se sentir mieux. Lors des premières rencontres avec ses patients, Sylvie leur propose un bilan sur leur voix actuelle et commence aussi, petit à petit, à projeter un objectif avec eux. 

Comment Sylvie intervient auprès des personnes transgenres ?

De manière générale, la hauteur de la voix d’une femme est plus aïgue que chez les hommes. La différence entre la voix masculine et féminine est d’environ de 100 Hz. Sylvie Brignone, nous explique les méthodes qu’elle utilise afin de passer d’un grain de voix grave à un grain de voix plus haut. 

Les méthodes pour changer de voix et comment la garder

Chez les personnes transgenres FtM, le traitement hormonal et la prise de testostérone entraînent une mue naturelle. C’est pourquoi, lors de notre échange avec Sylvie Brignone, nous nous sommes demandé s’il existait des aides médicamenteuses afin de modifier sa voix pour les personnes transgenres MtF. Ce n’est pas le cas et de toute façon les orthophonistes ne sont pas habilités à délivrer des ordonnances. Néanmoins, depuis quelques années, les femmes ont le choix entre deux opérations, sans risque médical : la criothyropexie qui permet de tendre les cordes vocales, et la laryngoplastie endoscopique qui permet de les raccourcir. Ces interventions sont très peu réalisées et souvent de derniers recours. Sylvie Brignone, le rappelle aussi : “ce n’est pas une obligation de changer sa voix. Il faut se sentir bien.”

Ce n’est pas une obligation de changer de voix

Transidentité et chirurgie

Parmi les démarches médicales, l’étape chirurgicale (d’affirmation de genre) intervient souvent en dernier. Évidemment, chaque personne transgenre décide de sa transition. Il n’est pas obligatoire de passer par la case chirurgie. Néanmoins, nous avons décidé d’en parler pour toutes ces personnes qui ont décidé de modifier leur physique, pour se sentir mieux dans leur corps et avec leur genre.

Pierre Bensa pratique la chirurgie plastique depuis plus de trente ans. Son cabinet actuel se situe à Dijon. Il nous a expliqué que sa "spécialité permet à ses patient(e)s de se sentir mieux dans leur vie au quotidien”. Pour lui, être en bonne santé c’est habiter son corps et avoir plaisir à le faire fonctionner.   

Un mal être parfois très grave peut naître d’un problème morphologique, et mon métier permet aux patient(e)s de modifier cette partie du corps à l’origine de ce malaise.

À savoir qu’avant toute intervention chirurgicale ou même visite chez le chirurgien, le patient suit un accompagnement psychologique ainsi qu’une prise en charge chez un ou une endocrinologue afin de mettre en place un traitement hormonal adapté. 

Parmi les patients du docteur Pierre Bensa, une majorité de FTM (Female to Male). La majorité de ses patients présentant une dysphorie de genre cherche à obtenir une identité masculine. “L’essentiel de mes interventions sont des torsoplasties.

Qu’il y a t-il de plus gênant pour un patient d’aspect masculin que de vivre avec une poitrine bonnet C ?

questionne le docteur

Nous avons demandé au chirurgien plastique, la liste des opérations possibles pour des personnes MTF ou FTM dans son cabinet.

Torsoplastie“C’est une intervention qui consiste à enlever la plante mammaire par voie aréolaire et faire ressortir un thorax d’aspect masculin jusqu’à un sein bonnet C”
Mammectomie ou mastectomie“C’est l’ablation du sein au delà d’un bonnet C ou sur une peau non élastique.”
Implants mammaires“C’est la création d’un sein féminin sur un thorax masculin.”
Injections d'acide hyaluronique ou lipostructure“C’est la création de volumes pour masculiniser ou féminiser le visage (pommettes menton, angles de la mâchoire).”

Quand Pierre Bensa reçoit ses patients, il essaie d’analyser au mieux leur demande afin de satisfaire leurs envies et besoins. Selon lui, le corps et l’esprit sont liés. Il est donc primordial d'accompagner les personnes transgenres et tous les autres patients vers les interventions les plus adaptées. “Les consultations préopératoires sont longues et minutieuses afin de m’assurer que la demande est bien ancrée .” partage le professionnel de santé.

Je dois à mes patient(e)s une information claire, honnête, complète, et intelligible.”

D’ailleurs, le chirurgien met un point d'honneur à ce que ses patients transgenres soient accompagnés et entourés psychologiquement par l'entourage (amis, famille, etc.) car pour lui “toute chirurgie est un acte brutal et un entourage est une aide à la prise en charge des suites opératoires.”

Il y a-t-il un point sur lequel insiste le professionnel de santé ? "J'insiste toujours sur la notion de temps car cette prise en charge n’est JAMAIS urgente et l’évaluation du rapport bénéfice/risque est essentielle.”

Pierre Bensa propose un suivi postopératoire d’un an, car “c’est le temps de stabilisation de la cicatrisation”. 

Introduction